Résumé Le penseur-poète Paul Valéry a été présent avec une étonnante constance et fréquence dans les écrits de Claude Zilberberg. Zilberberg avec Valéry, non pas Zilberberg et ou à propos de Valéry, mais avec —une solidarité intellectuelle et passionnelle jamais trahie. Cet article propose une analyse exhaustive des quelque deux cents citations valéryennes dans l’ensemble de l’œuvre de Zilberberg. Plus important encore que le détail de ces analyses, est la reconstruction de la philosophie de base de Valéry comme fond et source des réflexions sémiotiques de Zilberberg au cours des trente années de sa vie de chercheur. Cette pensée valéryenne d’une richesse et d’une cohérence indépassable se retrouve en totalité dans les intuitions et concepts de la sémiotique tensive de Claude Zilberberg. La philosophie de base de Valéry constitue la chair de l’œuvre zilberbergienne. Si Hjelmslev est la méthode, Valéry en est la chair, si Hjelmslev est la forme, Valéry en est la substance. De Valéry à Zilberberg, la transmission est fusionnelle, voire empathique: le sémantisme des notions reste strictement identique (« attente, surprise, événement, croissance, le brusque »…) tout comme la pulsion argumentative. En vérité, il s’agit bien d’une transmission pure et totale.

Abstract The poet-philosopher Paul Valéry has been present with constancy and frequency in the works of Claude Zilberberg. Zilberberg with Valéry, not Zilberberg and or about Valéry, but with —an intellectual and passionate solidarity never betrayed. This paper proposes an exhaustive analysis of more or less two hundred quotations of Valéry in the complete works of Zilberberg. More important still than the details of these analyses is the reconstruction of the foundational philosophy of Valéry as ground and source of Zilberberg’s semiotic thought during the thirty years of his research life. Valéry’s thought with its incredible coherence comes back in its totality in the intuitions and concepts of tensive semiotics as it was created by Claude Zilberberg. This foundational philosophy can be considered to be the flesh of Zilberberg’s writings. If Hjelmslev is the method, Valéry is the flesh, if Hjelmslev is the form, Valéry is the substance. From Valéry to Zilberberg, the transmission has been fusional, even empathic: the meaning of the notions remains strictly identical (“expectation, surprise, event, generation, suddenness”) as well as the argumentative pulsing. This has been in fact a pure and total transmission.

Resumen La presencia del pensador y poeta Paul Valéry ha sido constante en los escritos de Claude Zilberberg. Zilberberg con Valéry y no Zilberberg y o a propósito de Valéry, sino con —una solidaridad intelectual y pasional jamás traicionada. Este artículo propone un análisis exhaustivo de las cerca de doscientas citaciones valerianas en el conjunto de la obra de Zilberberg. Pero más importante aún que el detalle de estos análisis es la reconstrucción de la filosofía de base de Valéry como fondo y fuente de las reflexiones semióticas de Zilberberg en el transcurso de los treinta años de su vida como investigador. Este pensamiento valeriano de una riqueza y coherencia insuperables se encuentra íntegramente en las intuiciones y conceptos de la semiótica tensiva de Claude Zilberberg. La filosofía de base de Valéry constituye la carne de la obra zilberbergiana. Si bien Hjelmslev es el método, Valéry es la carne; si Hjelmslev es la forma, Valéry es la sustancia. De Valéry a Zilberberg, la transmisión es fusional, incluso empática: el semantismo de las nociones sigue siendo estrictamente idéntico (“espera, sorpresa, evento, crecimiento, lo brusco”, etc…), así como la pulsión argumentativa. Se trata verdaderamente de una transmisión pura y total.

Classical aesthetics sees the experience of the beautiful as an anthropological necessity. But, in fact, the beautiful is rather the central category designating classical art, and one can question the relevance of this category considering contemporary art. The reference term most frequently used for contemporary art is interesting: works of art solicit the interests of my faculties (the cognitive-intellectual, the pragmatic community-oriented moral, the affective aesthetic faculties). It is interesting to notice that the categories of the beautiful and the ugly have an axiological-moral value. It looks as if the qualities of contemporary art works are judged according to the intensity of the impact on the interests of our faculties. It reveals important, in this respect, to distinguish the ugly from the sublime and the monstrous. Kant’s Third Critique is of some importance in defining these categories.

L’esthétique classique considère l’expérience du beau comme une nécessité anthropologique. Mais, il faut constater que le beau est surtout une catégorie qui désigne l’art classique, et on peut même poser la question si elle est pertinente pour l’art contemporain. Le terme de référence le plus employé pour évoquer l’art contemporain est celui de l’intéressant : les œuvres d’art sollicitent les intérêts de mes facultés (les facultés cognitivo-intellectuelle, pragmatique et moral orientée par l’insertion dans la communauté, et esthético-affective. Il est bien de noter que les catégories du beau et du laid ont une valeur axiologique et morale. Il semble que les qualités de l’art contemporain sont jugées à partir de l’intensité de l’impact sur les intérêts de nos facultés. Il se révèle important, de ce point de vue, de distinguer le laid d’une part et le sublime et le monstrueux d’autre part. La Troisième Critique de Kant est importante pour la définition de ces catégories.